253
LA FRANCE JUIVE
Le nom le plus répandu esl celui de Mayer *. 11 est d'origine très reculée et fig .re dans l’Ancien Testament et dans le Talmud; il plaît aux Juifs en évoluant pour eux l’image de quelque chose qui brille. Le vrai mot, en effet, est Meïr (éclatant, rayonnant,) et dérive à la fois du mot or et du mot lumière.
Colin, Kahn,. Kohn, Cahen, Cahun sont autant de variations du mot hébreux Cohen (prêtre de la famille d’Aaron).
Les prénoms les plus usités chez les Juifs sont la traduction d’un mot hébreu: Maurice correspond à Moïse, Isidore à Isaac, Edouard à Aaron, James à Jacob, Alphonse à Adam.
La tolérance de la Restauration supprima en fait toutes les formalités qui auraient pu gêner les Juifs. Les tableaux dressés par ordre de l’Empereur, au contraire, sont des chefs-d'œuvre de vigilance, d’attention, de netteté dans les détails : ils contrastent avec le sans-gêne qui règne dans la France actuelle où chacun entre dans la patrie comme dans un moulin. Ils servent encore de plan et de modèle au comité anti-sémitique qui s’efforce de voir un peu clair dans nos affaires.
Les colonnes sont divisées ainsi. — Négociants, manufacturiers pour leurs commettants; — propriétaires exploitant des biens ruraux, exerçant des arts et métiers, faisant le brocantage ; — ayant concouru à la conscription, tombés au sort, servaut en personne, remplacés, servant ou ayant servi volontairement; — élèves fréquentant les écoles publiques; — relevés de créances hypothécaires.
La population juive de l’Empire est répartie dans 38 départements; elle est de 78,993 individus; mais les Juifs de pays nouvellement annexés en Hollande et dans le Nord ne sont point compris dans ce travail.
Le nombre des Juifs est de 46,663 pour toute l’étendue de la France actuelle.
I. Le chroniqueur de Y Illustration a raconté jadis à ce sujet une amusante anecdote qui, hélas! a jutant d’actualité maintenant à Paris qu'en Allemagne, tant les Mayer sont nombreux chez nous.
« De l'autre côté du Rhin, les Meyer avec un e, un a, un i, un y, pullulent autant et plus que les Durand en France : Meyer, Mayer, Meïer, et les anai s'en divertissent.
« Par exemple, un bourgeois de Berlin, Schiiltze ou Müller, arrive au théâtre en retard. La salle est pleine. Pas un fauteuil inoccupé, pas un strapontin libre. Et pourtant Müller ou Schiiltze tient à voir la pièce et à être assis convenablement.
« Que faire? C'est bien simple. Dès que vient l’entr’acte, il se campe à l’entrée du couloir et crie d'une voix effarée :
« — Messieurs, le feu est chez M. Meyer.
« Le feu!... Chez M. Mayer! Tout aussitôt, une cinquantaine de spectateurs se lèvent, très pâles, et tous les Mayer, les Meyer, les Meïer se précipitent vers la porte de sortie, pendant que, très tranquillement, le farceur berlinois choisit, parmi les stalles devenues vacantes, celle qui lui parait la meilleure. »