LA FRANCE JUIVE
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d’iionnètes Israélites voués au culte du Veau d’or, elle crut pouvoir, comme sor mari, traiter les rois d'égal à égal. Elle lit mettre ses chevaux à la voiture et ordonna qu’on la conduisît aux Tuileries . Mais lù, cruel désap. pointement! on refusa de la recevoir 1 .
Piquée au vif, elle revient chez elle; des pleurs coulent de ses yeux. Jérusalem ! s’écrie-t-elle, Jérusalem ! quelle otfense pour ton peuple! Des courriers extraordinaires sont expédiés sur-le-champ à toutes les cours d’Allemagne pour les instruire de ce grand événement. Les rois s'agitent, les conseils s’assemblent, les diplomates discutent. Metternich prend la plume, l’ambassadeur d’Autriche court aux Tuileries , la porte à deux battants s’ouvre, et notre baronne a franchi la salle des Maréchaux. Alors tout est joie dans Israël ; les montagnes bondissent comme des béliers, les collines comme des petits agneaux. Les harpes qui dormaient suspendues aux saules du rivage frémissent de nouveau sous les doigts des filles de Sion , et le peuple élu célèbre encore une fois le merveilleux passage de la mer Rouge .
A propos de la mer Iiouge, savez-vous que cette couleur est celle que notre Crésus circoncis affectionne de préférence, et que c’est avec un uniforme rouge, surchargé de deux épaulettes de colonel, qu'il a coutume d’assister à toutes nos réjouissances nationales? Sa fidèle Itébecca, l’élue de son cœur, l’ange de ses affections, l’accompagnait au dernier bal de la Ville. Cette perle d’Israël , qui peut avoir vingt-huit ans, était enchâssée dans une embrasure de croisée, entre deux diamants chrétiens d’une si belle eau qu’ils absorbaient tout son éclat.
Ces sentiments de répulsion subsistèrent très longtemps. En 18K1, en l’honneur de l’arrivée à Baden d’un souverain étranger, on voulut organiser un bal. On nomma, pour régler les détails de la fête, trois commissaires, parmi lesquels M. Maurice de Haber. Les deux autres refusèrent d'avoir pour collègue un Juif, quoique ce collègue lut M. do Haber, le richissisme banquier de Cologne , allié à la famille d’un maréchal de France, h la famille de Cirouchy. M. de Haber envoya des témoins. Les commissaires refusèrent de se battre avec lui et ne consentirent à croiser le fer qu'avec un de ses amis.
« Le piquant de l’allaire, disent les Archives Israélites 2 , auxquelles nous empruntons cette histoire, c’est que M. de Haber, bien que gendre de
1. L’an dernier, le duc d’Aumale ayant à dîner la duchesse d’Ayen et la baronne de Hirsch, mit ta Juive à sa droite, et la duchesse à sa gauche. Lors des fêtes données à Chantilly, il plaçait, il est vrai, la grande duchesse Wladimir à sa droite et la baronne (iustave de Rothschild à sa gauche, mais en quittant la table, il offrait le bras à la baronne!
Remarquez que la duchesse d’Ayen qui est, dit-on, une femme très charitable et très bonne, n'a aucune raison de fréquenter la femme d'un banquier qui a ruiné tant de malheureux ; elle n'a pas besoin d'emprunter de l'argent aux Juifs, car elle possède une fortune considérable; elle a hérité du marquis de la Ferté-Mun, qui était fort riche, et elle est la belle- tille flu duc de Noailles, auquel appartient la magnifique terre de Maintenon . On ne peut s'expliquer cette manie de s'abaisser sans nécessité, d. Archives. Israélites, volume 36.