546
LA FRANCE JUIVE
On a beaucoup parlé des splendeurs de Ferrières, et, au risque de désillusionner un peu les badauds, il est nécessaire de montrer à nos lecteurs ce qu'est en réalité la demeure du roi des Juifs.
Versailles , bâti dans un pays sans eau, a évidemment inspiré aux Rothschild le désir d’imiter Louis XIV ; ils ont été guidés encore par d’autres considérations : la facilité, en cas d’alarme, de gagner l’Allemagne par la ligne de l’Est 1 , le souvenir d'une colonie juive qui, nous l’avons vu, fut très florissante au Moyen Age dans cette région à Chelles , à Meaux , à Lagny, à Gagny .
Avec leur mauvais goilt ordinaire et leur peu de sympathie pour nos artistes français , les Rothschild ont chargé un architecte anglais , Paxton, d’édifier cette royale habitation. Ce qui devait se produire arriva.
Notre grand architecte national, Philibert Delorme , dans son Traité cl’tv'chU<ecture y dit d’excellentes choses sur l’impossibilité, pour des étrangers, de bien comprendre les conditions qui conviennent à notre pays, d’harmo- niser leurs constructions avec le climat, le ciel, les habitudes françaises.
Ferrières donne une fois de plus raison à l'abbé de Saint-Serge. Paxton a élevé là un de ces châteaux bizarres, comme on en voit quelques-uns en Angleterre, et qui, avec ses quatre façades de style dissemblable, semble tout dépaysé au milieu de nos pays du Nord. On pense involontairement à ce gigantesque caravansérail de Schatfhaûsen qui, avec ses hautes colonnes et ses promenoirs à l’italienne, détonne si singulièrement avec le paysage devant la chute du Rhin ,
L'intérieur est plus intéressant. Après avoir traversé un large vestibule que décore un plafond de Tiepolo , on pénètre dans une petite salle à manger qui contient quelques jolies peintures de Philippe Rousseau. La grande salle A manger A poutrelles, avec ses quarante fauteuils en velours rouge, ne manque pas d'une certaine aliure.
les autres puissances, et cédant constamment le pas, à Versailles , à Jacques 11, pauvre ci détrôné?
1. Les hôtels des Rothschild , à Paris , sont machinés Comme des théâtres, barricadés a l'intérieur comme «les citadelles, organisés pour la défense comme des ghettos du Moyeu Agé-. Si je ne craignais de nuire à des entrepreneurs, je pourrais donner là-dessus de bien curieux renseignements. I^e World de Londres , au mois de décembre 1885, a publié quelques détails sur les travaux exécutés dans l'hôtel de la rue Saint-Florentin :
« Le baron Alphonse de Rothschild vient de terminer la transformation de sa maison a® la r#e Saint-Florentin en une sorte de fortoresse blindée. Les montres ou vitrines à bibelots disparaissent à une simple pression de bouton dans des coffres-forts scellés dans la m u ' raille.
« Chaque tableau a son étui (numéroté) en maroquin, de sorte que, s’il le fallait, t° ule la galerie pourrait être emballée en une heure. La note seule des étuis se monte à 50,000 fi-” Auront-ils l’heure nécessaire pour emballer?