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tion de Delaunay. C’est un vrai tableau de décadence, mais d’une décadence spéciale, d» clamatoire et burlesque.
Comme il arrive à la veille de tous les grands événements, des bruits étranges avaient couru. Delaunay avait mis le marché à la main à la France ; il avait fait annoncer ses dernières représentations. Vous comprenez l’inquiétude qui régnait à la Chambre. L’Angleterre venait de nous chasser de l’Egypte , ce qui avait paru peu de chose; la nouvelle que Delaunay se retirait était autrement grave. Pour comble de malheur, Delaunay, nous apprend le Gaulois , avait prononcé des paroles sinistres. — On lui avait entendu murmurer : « On m’a dit au 1 er janvier qu’il fallait attendre Pâques , à Pâques que la distribution des prix n’était pas loin. »
En ces heures oscillantes et perplexes où va se décider la destinée du monde, les plus forts se sentent agités. Febvre, cependant, était fort calme; « il se tenait immobile dans son cabinet; Déroulède , plus nerveux, allait de la salle au foyer et du foyer à la salle. »
Voyant son ombre aller et venir sur la toile,
Les cabots, qui croyaient encore à cette étoile,
Accusaient le Destin de lèse-majesté.
Tout à coup Ferry arrive avec le général Pittié, chef de la maison militaire du Président delà République , et il dit à Delaunay : « Je vous décore sur le champ de bataille. » Vous apercevez le champ de bataille d’ici : des pots de rouge et de blanc, une patte de lièvre,des postiches, des perruques et cette odeur spéciale de loges d’acteurs faite de parfums rancis, de mixtures pharmaceutiques, de poudre de riz et d’oppoponax. Vous voyez ce vieux maquillé délayant son rouge en pleurant sur les favoris de Ferry , et le général Pittié au milieu de cette scène, disant ; «C’est égal, quelle leçon pour M. de Moltke ! »
« Bien entendu, dans la salle, M. Bisch. Tsheim rayonnait d’avoir, en astronome qui aime le progrès, découvert l’étoile des braves sur la poitrine d’un sociétaire de la Comédie-Française. »
Dans les classes supérieures, l’histrionisme a un caractère tout à fait romain.
Au cirque Molier, des jeunes gens élégants, habillés en clowns, donnent chaque année deux représentations : une pour les femmes du monde, une pour les femmes de tout le monde. Les invitations sont avidement recherchées, et les Françaises sont là, regardant leurs lils ou leurs