LA PERSÉCUTION JUIVE
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je payerais le fiacre au besoin. Voulez-vous savoir comment Germain Sée qualifie la possibilité même d’un acte pareil? « Mon cher ami, écrit-il à son complice Lockroy, si vous avez lu le Monde d’hier, vous y trouverez une monstruosité sur le désir qu’aurait manifesté le Maître de se confier à un prêtre. »
Je vous demande en quoi il serait monstrueux qu’un homme qui a dû ses plus belles inspirations à la religion chrétienne , qui a célébré Jésus , l’Église, la prière en vers immortels, eût le désir, avant de quitter la terre, de causer avec le ministre d’un Dieu qui a été le sien.
Lockroy est plus insolent encore. Les rédacteurs du Monde, voulant espérer que l’âme du poète était sauvée, avaient demandé simplement et très convenablement si Victor Hugo n’avait pas souhaité voir un prêtre. « Les drôles, qui rédigent un journal religieux appelé le Monde, » voilà sur quel ton Lockroy commence sa réponse.
Lockroy est sûr de ce qu’il fait en écrivant ceci. Il est de ceux qui ont reçu le plus de corrections dans leur vie et qui les ont reçues le plus patiemment. Il avait fait tout jeune l’apprentissage des humiliations en voyant son père, moyennant quelques feux modestes, se livrer à des pitreries ou tendre le dos pour amuser la foule au théâtre. Il justifie donc ce que dit Montaigne , dans son langage imagé, de la puissance de l’habitude: « Celui-là me semble avoir très bien conçu la force de la caustume, qui premier forgea ce conte qu’une femme de village ayant appris à caresser et à porter entre ses bras un veau dès l’heure de sa naissance et continuant toujours à ce faire, gagna cela par l’accoutumance que, tout grand bœuf qu’il était, elle le portait encore. »
Avec les journalistes catholiques, Lockroy prend sa revanche. H y a là des officiers, d’anciens zouaves pontificaux, qui ont été héroïques sur les champs de bataille et dont la vue seule ferait cacher Lockroy sous la table ; retenus par les défenses de l’Église, ils laissent ce malheureux les insulter sans lui envoyer de témoins.
Les camarades de Lockroy tirent de là, naturellement, des conséquences absolument fausses. Je vous citerai Louis-Stanislas Meunier. J’ai lu de lui des articles où retentissait parfois, à travers les blasphèmes, une note vibrante et originale, où l’on trouvait une peinture sincère de nos misères sociales que la France doit à la Révolution. Voyez, cependant, ce qu’il écrit à ce sujet :
Quel derrière, mes amis, que celui du cléricalisme! Gomme cette roton- e charnue semble destinée admirablement aux coups de bottes! Voyez