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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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LA FRANCE JUIVE

la justice républicaine ne put échapper que par la fuite à ceux qui voulaient le lyncher.

Cest encore une ligure de magistrat bien curieuse que celle que le Figaro 1 nous présente dans la personne de M. Glerget-Allemand , président du tribunal civil de Mâcon , et particulièrement protégé par M. Martin- Feuillée :

Son aspect était fruste, ses allures revêches; son langage toujours dur lui avait fait donner le surnom pittoresque de « Gueule-dAcier. » Il ne prenait un ton plus doux vis-à vis de ses subordonnés quen sinvitant à dîner chez eux, ce quil appelait modestement pâturer.

Cet homme aimable mourut au mois de juillet 1885 et, un juge des nouvelles couches, du nom de Martin, dans le discours quil prononça sur cette tombe, offrit le défunt en exemple aux populations, comme le modèle de toutes les vertus civiques. Hélas! comme pour Guillot, la douleur ne tarda pas à se changer en une stupéfaction générale :

On apprit alors, en effet, que ce magistrat avait exploité le pays sur la plus large échelle. Dénué de toutes ressources autres que son traitement, qu il se faisait dordinaire payer davance, il avait mis à contribution et comme en coupe réglée nombre de gens et notamment les officiers minis­tériels qui étaient sous sa dépendance. Notaires, avoués, huissiers mômes ont été victimes de ses manœuvres et de ses soustractions.

Voici comment il procédait : Il allait chez un notaire, et, après avoir parlé de ses propriétés ravagées par le phylloxéra, propriétés qui nexis­taient que dans son imagination, il alléguait un embarras dargent momentané et demandait à emprunter 3.000 fr. Cétait le taux pour les notaires. Le notaire, craignant de se brouiller avec le président du tri­bunal, sexécutait bon gré, mal gré.

Quinze jours après, M. Clerget frappait à la porte dune autre étude, recommençait son boniment et terminait par la demande invariable de 3.000 fr. Le notaire, heureux dobliger le président, et croyant être le seul « honoré » de cette confiance, allongeait les trois billets de mille.

Six notaires de Mâcon furent ainsi pris. L'un deux reçut même deux fois la visite du président. A 3.000 fr. la visite, coût: 6.000 fr. Ces soi-disant prêts étaient faits par billet avec intérêts ; mais lhonnête président ne se préoccupait pas plus des intérêts que du reste. Lun des notaires, victime de cet emprunteur, lui écrivit un jour pour réclamer le paiement des intérêts. Il ne reçut pas de réponse. Seulement, quelque temps après, il apprit quil était commis par le président à une liquidation sur laquelle il ne comptait pas : « Ah! voilà mes intérêts! » sécria-t-il.

! est juste de dire que M. le président Clerget était très large en fait

t. Figaro, 12 août 1883.