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LA FRANCE JUIVE
remémorent l’un à l’autre les circonstances de leur voyage d’autrefois.
— Te rappelles-tu ce religieux qui nous faisait si bon accueil, et que tu remerciais si chaleureusement; qu’ost-il devenu?
— Ma foi!,je n’en sais rien; il doit errer sur une route quelconque, car je viens de mettre la gendarmerie après lui.
C’est contre le pauvre encore, contre le pauvre uniquement, qu’est édictée la loi scolaire. Le riche trouvera toujours le moyen de faire élever ses enfants chrétiennement : le pauvre ne le peut pas: pour lui l’athéisme est obligatoire. On a appelé des petits Mortarns laïque s ces enfants qu’on arrache violemment à la religion de leurs pères. Le mot n’est juste qu’à moitié. On ne leur donne même pas une religion à la place d’une autre. Les malheureux, pour qui la vie sera la plus dure, qui auraient le plus besoin d’une foi, d’une espérance, d’un idéal, sont privés de tout enseignement religieux.
lilevés sans Dieu , vivant sans Dieu , ils mourront sans Dieu ,
Le prolétaire est au terme de sa course; sur la tombe des Domains on inscrivait le cursus honorum : c’est le cursus dolorum qu'il faudrait inscrire, si les inscriptions ne coûtaient pas si cher, sur cette tombe qu’on va creuser dans la fosse commune pour ce paria et ce vaincu, Il a travaillé pour enrichir les Juifs, il a été empoisonné par les marchands de vin juifs, chers à Lockroy, il est à bout. Jadis, ce déshérité trouvait près de son chemin un être de bonté, mère, sœur, et femmeà la fois, qui lui montrait un peu de ciel bleu.
La Sœur n’avait pas besoin de parler beaucoup pour affirmer qu’il y avait au delà de ce monde cruel ot misérable un monde où tout était justice et lumière; sa présence près de ce lit proclamait assez haut les promesses éternelles. Charmante, intelligente, riche souvent, elle avait tout sacriüé et elle était là, dans cette atmosphère empestée, attentive aux souffrances de tous, soignant avec un dévouement souriant des plaies parfois dégoûtantes, préférant à tout ce titre de servante des pauvres, c'est-à-dire des enfants de Dieu .
Désormais, le malheureux n’a plus même le droit d’espérer dans une patrie céleste. Chien malencontreux qui, de sa vie, n’a jamais trouvé un bon os, il sera enfoui comme les bêtes, perinde ac jumenta...
Cette persécution du moribond, cette laïcisation, contre laquelle ont protesté 7(> médecins sur 8<), est peut-être le crime des crimes parmi tant d’actes abominables. Si quelque savant eût découvert un breuvage consolateur, ne se hâterai t-on pas d'acheter Jes précieuses fioles qui contien-