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LA FRANCE JUIVE
rité relative. Eu pleiu Moyeu Age, Avignon put être appelé « le Paradis des Juifs ».
Mistral n’a pas oublié les Juifs dans le tableau plein de couleur et de mouvement qu’il a tracé, dans Nerto, de l’Avignon des Papes.
E de cridèsto, de bravado,
De paro-garo et d'abrivado,
Km’un judieu, de fes que i a,
Qu’alin davans cour esfraia.
— Lou pecihoun ! lou capèu jaune !
A lajutarié I que s’encaune t Cinquanto enfant ié soun darrié ;
E d’un pouceu, per trufarié,
Simulant éli l’auriheto.
Em’un gueiroun de sa braieto, lé crido lou vou d'esparpai :
Vaqui l’auriho de toun pail
Bref des crieries, des défilés bruyants,
Des échauflourées, des alertes,
Et parfois quelque Juif Qui là-bas, effrayé, décampe...
— « Le guenillon ! le chapeau jaune !
A la juiverie! qu’il se cache!
Cinquante enfants sont après lui ;
Et d'un pourceau, par dérision,
Eux simulant l’oreille
Avec un coin de leur braguette,
La volée d’étourdis lui crie:
Voilà l’oreille de ton père!
Les Juifs avignonnais. qui comptaient parmi eux des rabbins distingués, semblent avoir formé, même pendant assez longtemps, une branche particulière différente des Juifs allemands et des Juifs portugais. Au xiv» siècle, le rabbin Roüber leur fit. adopter un rituel spécial qu’ils suivirent jusqu’au xvm» siècle, époque à laquelle ils se fondirent définitivement avec les Juifs portugais.
Sans doute, de temps en temps, des mouvements populaires éclataient contre eux, à la suite d’usures trop criantes, mais le Pape ouïe légat intervenait toujours pour calmer les esprits.
Là, comme ailleurs, cependant, les Juifs ne se gênaient guère pour faire des malhonnêtetés aux chrétiens qui consentaient à les accueillir, et pour insulter leurs croyances. Longtemps on aperçut, à l’entrée de l’église Saint- Pierre d’Avignon, un bénitier qui rappelait un de leurs tours : le bénitier de la Belle Juive. Une Juive, d’une rare beauté, avait trouvé plaisant de pénétrer dans l’église le jour de Pâques et de cracher dans l’eau bénite. La Belle Juive, aujourd’hui, à la suite de cet exploit, serait nommée inspectrice générale des écoles de France; alors elle reçut le fouet en place