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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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LA FRANCE JUIVE

les Juifs durent lentretenir jusquen 1793, époque elle fut remplacée par un arbre de la liberté. Lhomme de paille avait été déposé aux archi­ves de la cour épiscopale, et on le sortait une fois par an.

La colonie juive de Bordeaux avait seule prospéré. Quand lEspagne, après la défaite définitive des Maures de Grenade, se vit appelée à jouer un rôle en Europe, elle fit ce quavait fait la France dès que la monarchie sétait constituée; elle élimina de son sein les éléments qui étaient une cause perpétuelle de trouble. Le 30 mars 1492, le roi Ferdinand dAragon et la reine Isabelle de Castille, sur lavis de lillustre Ximénès, rendirent un arrêt qui ordonnait à tous les Israélites de sortir du pays.

Quelques familles se réfugièrent alors en Portugal, elles trouvèrent une précaire protection; bientôt elles furent expulsées encore, et Michel de Montaigne, dont les parents avaient fait partie de ces persécutés, a raconté les circonstances navrantes de ce nouveau départ dans un chapitre lon sent plus démotion que dans les pages ordinaires du sceptique.

Quelques-uns de ces proscrits vinrent chercher un asile à Bordeaux. Parmi eux se trouvait Ramon de Granolhas, Dominique Ram, Gabriel de Tarragera, Bertrand Lopez ou de Louppes, les Goveas, qui se firent assez rapidement, comme jurisconsultes, médecins, négociants, une place dans la société de Bordeaux 1 .

La mère de Montaigne, Antoinette de Louppes, ou Antoinette Lopez, était donc Juive, et ce fait nest pas sans intérêt pour ceux qui aiment à expliquer par la filiation le tempérament dun écrivain. La sagesse terre à

1. Ici encore se vérifie ce que nous disions de linfluence du milieu pour le Juif. Malgré leur apparente exubérance, les Bordelais sont au fond des gens froids et sérieux comme leur vin. LAngleterre,qui a occupé si longtemps ces contrées, va laissé un peu d'elle-même, de son bon sens, de son esprit réfléchi; les Bordelais, par bien des points, sont des Anglais plus capiteux. Israël, représenté dailleurs par des hommes de mérite, ne trouva pas une population qu'il pût troubler, mais une bourgeoisie très capable d'apprécier les sérieuses qualités commerciales des nouveaui venus. Plus que les lettres patentes dHenri II, les dispo­sitions générales des classes élevées protégèrent les arrivants, les défendirent, leur permi­rent de fonder un durable établissement.

Notons, en passant, le côté vil de la race qui rend toujours le mal pour le bien. Sous la Terreur, dans une fête de la Raison, les Juifs de Bordeaux organisèrent une parodie sacrilège dans le genre de celles d'aujourdhui ; la Papauté, qui dans tous les pays du monde avait pris la défense des Juifs, était traînée dans la boue; un Juif dune taille colossale marchait à la tête du cortège en vomissant des obscénités.

Remarquons encore à ce sujet, que cest à Bordeauique la Juive Déborah, pour déshonorer larmée française, vint ourdir cette trame dans laquelle furent pris trois officiers, qui étaient, selon toute apparence, absolument innocents, mais qui furent victimes du bruit que la presse juive fit autour de cette affaire.

Au moment de l'exécution des décrets, toute la canaille juive de Bordeaux insulta dans la rue les religieux quon venait de chasser de chez eux.