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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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LA FRANCE JUIVE

mère memmena avec elle pour savoir pourquoi on napportait pas une paire de bottes promise depuis longtemps. Quand nous arrivâmes, dans lescalier noir, un escalier affreux à la rampe humide que je sens toujours, tant sont vivaces les impressions enfantines, suinter sous mes doigts, tout un monde de commères, de voisins, douvriers commentait la lamentable histoire du malheureux. Avec les économies de toute sa vie, il avait, par l'entremise dun changeur juif , acheté des actions du Crédit mobilier à linsu de sa femme; il avait tout perdu, et il s était pendu avec les cordons de son tablier de travail.

Ces menus détails ne troublaient point, je suppose, Isaac Pereire ; il était fidèle cependant aux théories humanitaires de sa jeunesse; après avoir commencé par faire son bonheur à lui, il rêvait de faire le bonheur du monde entier.

Volontiers il plaçait dans la conversation le fameux aphorisme :

« Toutes les institutions sociales doivent avoir pour but lamélioration du sort moral, intellectuel et physique delà classe la plus nombreuse et la plus pauvre. »

Notez que le Saint-Simonisme na amélioré ce sort en aucune façon, tout au contraire. Le pauvre chauffeur qui, nuit et jour debout sur sa locomotive, exposé au froid, à la chaleur, le visage fouetté par la neige et par le vent, contracte une de ces terribles maladies que la science demeure impuissante à guérir, est bien inférieur, au point de vue physique et moral, au bon villageois qui vivait paisible dans un coin de la vieille France , ne travaillait pas au delà de ses forces, et sendormait dans la mort avec les­pérance de jouir des béatitudes éternelles.

Il en est de même de la devise célèbre : « A chacun selon sa capacité, à chaque capacité selon ses œuvres.» Que de bascoulissiers juifs, de Franc­ fort ou de Cologne , venus en France à la suite des Rothschild , et qui nont ni capacité, ni œuvres bonnes ou mauvaises, possèdent le superllu, tandis que des hommes, qui ont de la capacité et qui ont produit des œuvres., manquent du nécessaire !

Aucune de ces doctrines ne résiste à lexamen, et comme tant dautres, Isaac Pereire prêchait toujours la participation sans avoir jamais fait par­ticiper à rien ceux qui lentouraient.

Profitons de la circonstance pour faire remarquer le côté blagueur de tous ces prétendus apôtres du Progrès. Voilà, par exemple, un homme comme Isaac Pereire , qui a toute sa vie chanté lassociation, la coopération; comment na-t-il pas eu lidée de dire : « Tiens, jai été journaliste et beso­gneux dans ma jeunesse; le journal la Liberté nest quune épingle dans