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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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LE JUIF DANS L'HISTOIRE DE FRANCE

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blime familiarité que tous les volumes des rhéteurs: « La Justice et la Paix sont deux intimes amies *. » Justifia et Vax osculatœ sunt.

La justice est le premier besoin des peuples ; en même temps que la garantie des intérêts, cest la satisfaction dune aspiration innée dans toutes les âmes humaines. La France apporte à cet amour la passion qui lui est propre. Que demande cette nation éprise didéal? La justice. Que cherche- t-elle, même dans ses révolutions? La chimère, lombre, la parodie de cette justice qui lui est nécessaire comme lair pour respirer. Pourquoi la Royauté française, si chétive dans cette Ile-de-France qui fut son berceau, a-t-elle si vite et si prodigieusement grandi? Cest que les premiers Capé­tiens furent, avant tout, des hommes de droiture et de justice. Quelle est limage de roi restée la plus vivace et la plus populaire? Est-ce celle de tant de monarques menant de hardies chevauchées et sélançant au plus épais des rangs ennemis? Non, cest limage dun justicier assis sous un chêne. Plus que le souvenir du pont de Taillebourg défendu par un homme seul contre toute une armée, le souvenir de ces assises rustiques chacun, sans intermédiaire, pouvait faire reconnaître directement son droit par celui qui avait la force, est demeuré gravé dans les âmes.

Pourquoi, après une si longue éclipse de la Royauté, alors que depuis de longues années le parti légitimiste nétait plus quun brillant étal-major sans soldats, le pays appelait-il librement, spontanément, des représentants du principe monarchique? Cest parce que la Monarchie , toujours tendre aux petits, avait su, à loccasion, être sévère aux forts.

C'était pour faire justice que le pays, dans son intérêt, avait eu recours aux hommes de la tradition, aux députés du sol, à des hommes dont les familles, la vie ordinaire, le caractère étaient connus de tous et inspiraient confiance, en des temps troublés, à ceux- même qui, dans les temps ordi­naires, leur eussent préféré des bateleurs et des charlatans.

Il manqua à cette époque un homme animé de ce noble amour de la justice, un homme au cœur élevé, à làme grande, doux aux égarés, ter­rible aux pervers qui avaient vendu de sang-froid leur pays, qui prît la direction du parti monarchique et demandât avant tout le châtiment dun aventurier comme Gambetta, qui sétait permis de conclure des emprunts sans lautorisation du pays, dun Ferry , dun Jules Favre .

Non seulement les catholiques trahirent le mandat de justice qui leur avait été confié contre les hommes du 4 Septembre, mais ils laissèrent la

1. Justifia fundamentum Regni, lit-on sur la façade du Ilofburg, le palais impérial de Vienne, et linscription est bonne et bien placée.