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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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LA FRANCE JUIVE

4 Septembre trouva que Cambon avait tout pris pour lui et ne lui avait rien laissé, et il courut raconter tout au long, dans le Figaro , ces malpro­pres tripotages. On entendit alors, pendant quelque temps, le duo le plus amusant qui se puisse imaginer entre la Lanterne et le Figaro . La Lanterne louait imperturbablement lintégrité de Floquet et déclarait quun fonc­tionnaire comme Cambon, qui se prêtait à ces trafics, était le plus mépri­sable des concussionnaires. Le Figaro , sans défendre Cambon, affirmait avec quelque raison, quil était honteux à Floquet de sentremettre pour ce Mustapha, qui avait été si longtemps deliciœ domini, et de déshonorer ainsi non seulement lui-même ce qui était peu de chose mais la Cham­bre française dont il était le vice-président et dont il fut plus tard le pré­sident.

Ils avaient raison tous les deux, lun pour Cambon, lautre pour Floquet. Sans doute, sous prétexte de civilisation, on a cruellement rançonné sou­vent les peuples prétendus barbares, mais jamais aigrefins ne se sont abat­tus sur un pays avec plus de rapacité; jamais on na vu des hommes poli­tiques étaler plus effrontément leur corruption ; jamais faits ne furent plus ignominieux que ceux pour lesquels la presse dut ouvrir une rubrique spéciale: Les Odeurs de Tunis .

Ce quil faudrait dire, ce sont les souffrances endurées par nos soldats pour permettre aux Juifs de se livrer à ces opérations.

Ce qui a manqué au récit de cette expédition, cest un écrivain-pein­tre, à la manière de Fromentin , racontant les indicibles souffrances de cette guerre faite pour procurer de largent à des boursiers.

Qui na senti ses poings se serrer en entendant un officier vous décrire cette marche en colonnes, sous un ciel dairain, sans un arbre à lhorizon, sans une source, avec le désert à quelques pas ! Sur des chameaux, on porte l'eau nécessaire qui, parfois, est en retard de trois ou quatre lieues et

1 . Voir le Figaro des 9 et 11 juillet 1885, qui ne donne point toute la genèse de laffaire, comme nous le faisons, mais la spéculation Floquet, Naquet et C le est très exacte­ment résumée; consulter également les innombrables articles de la Lanterne. Ces deux journaux se complètent sur cette question comme les deux bouts dun étui. La Lanterne, on le sait, avait mis Cambon au défi de la poursuivre et, pour éviter le procès, on dut nom­mer une commission dite des blanchisseurs composée de Al. de Saint-Vallier, lancien ambas­sadeur, de Flourens, président de section au conseil dÉtat, et de Martin, inspecteur général des ponts et chaussées.

Al. de Saint-Vallier fut si incommodé des miasmes qui se dégagaient de cette lessive quil en mourut six semaines après.