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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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LA FRANCE JUIVE

dun Taine? Assurément non. Malgré ses roueries et ses finesses, cet être est trop giossier pour ne pas être relativement aisé à saisir. Il faut seule­ment bien voir les deux éléments dont il se compose : cest un Juif et cest un Empereur; un Juif modernisé, croisé et métissé tant que vous voudrez, un tempérament dEmpereur de lordre le plus vil et le plus bas, je vous laccorde, mais enfin cest lun et lautre.

Quand Rome eut conquis le monde, le monde conquit Rome. Rome eut successivement des Empereurs espagnols et des Empereurs africains; elle eut des Empereurs gaulois qui mangeaient un bœuf à leur souper, et des Empereurs thraces qui abattaient dun coup de poing les chefs de cohortes qui déplaisaient. Elle eut un Empereur syrien, lHéliogabale do seize ans, qui, constamment vêtu en femme, les bras chargés de bracelets, présidait, dans sa longue robe traînante à la phénicienne, au mariage de la Pierre Noire avec la Lune. Quoique le fils de Sœmias fût circoncis, Rome n'eut point dEmpereur juif. Gambetta fut un instant cet Empereur. Ce nest point un César déclassé précisément, cest un César oublié qui avait man­qué son entrée et qui a repris son tour dans le hasard dun interrègne.

Pour le bien comprendre, il faut se figurer une manière de Rarabbas, Barabbas gracié, devenu préfet du Prétoire un beau matin, au milieu dune bagarre, et se faisant adjuger la pourpre à force de bagout.

Cette sorte de réapparition tardive dun type lointain est curieuse et vaut la peine quon examine bien lévolution du personnage.

La foudre ne gronde pas autour de ce berceau le jour de la naissance, mais lorigine est intéressante. Gambetta ne naît pas de parents étrangers, car, somme toute, être étranger dans un pays, cest avoir une Patrie quel­que part: il a pour générateurs (les forains. A la suite du remuement des peuples par la Révolution française, certains Juifs, ainsi que nous lavons expliqué, se mirent à parcourir lEurope, cherchant çà et sétablir. Un Juif wurtembergeois, A. Gamberlé, se fixa à Gênes au temps du blocus continental, fit le commerce des cafés et la contrebande, épousa une Juive du pays dont un des parents avait été pondu, et italianisa alors son nom, en sappelant Gambetta *. Le fils ou le petit-fils vint en France, sétablit

1. Voir à ce sujet un étrange volume dont nous avons déjà parlé, le Judaïsme en France, publié à Stuttgard en 1872, ouvrage presque introuvable, les Juifs en ayant fait dispa­raître tous les exemplaires, qui contient de très curieux renseignements sur le mouve­ment juif en France, et particulièrement sur le rôle joué par Mgr Rauer.

Les Archives israélites nous ont conservé un joli mot du prince de Bismarck à propos de Gambetta. » Je métonne, disait le Chancelier à son passage à Berlin en 1880, que les Juifs du Conseil municipal de Berlin n'aient pas encore nommé ciloyen honoraire de Berlin