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LA FRANCE JUIVE
On sait comment se produisit ce fait peu connu. Au mois de mai 1839, un procès était engagé entre une femme Wolff, demeurant à Lixheim, canton de Phalsbourg, et un habitant de Drulingen (Bas-Rhin), arrondissement de Saverne, à propos d’une créance que celui-ci contestait.
Les juges déférèrent à la femme Wolff le serment more judaïco.
M. Isidore, alors rabbin de Phalsbourg, et depuis grand rabbin de France, fut invité, par acte sur papier timbré, à faire prêter le serment. Au jour indiqué par l’assignation, les plaideurs et les témoins arrivèrent devant le temple, et le trouvèrent fermé. M. Isidore déclara nettement qu’il refusait son concours.
— Ce n’est qu’en qualité de rabbin, \ dit-il, que je puis faire prêter ce serment dans le temple, devant le livre de la Loi, le sanctuaire ouvert. Aujourd’hui, ce serait un serment exceptionnel, je m’y refuse. Le serment more judaïco porte atteinte à nos droits de citoyen français.
A l’heure actuelle, quand un religieux veut défendre ses droits de citoyen français, tous les journaux juifs l’accablent d’injures, le traitent de rebelle, le diffament sur tous les tons. Aucun catholique n’insulta alors M. Isidore.
Le tribunal de Saverne, devant lequel le débat fut porté, se déclara incompétent, et, l’influence de Rothschild déjà tout-puissant aidant, le conseil d’Etat donna raison à M. Isidore, à la suite d’une très habile plai- doierie de Crémieux 1 . On sait qu’après avoir commencé à demander à prêter le serment comme tout le monde, les Juifs Lisbonne, Moyse, Camille Dreyfus ont entrepris une campagne pour empêcher les Français de prêter le serment, comme ils en avaient l’habitude.
Grémieux agit de même pour l’enseignement. Les Juifs avaient une préférence qui se comprend pour les écoles où l’on enseignait la thora aux enfants ; le Christ, qui sanctifiait nos classes, leur causait un sentiment d’horreur. Crémieux insista quand même pour qu’on envoyât les jeunes Israélites aux écoles publiques : « Mes amis, dit-il, dans une séance de Y Alliance Israélite, ayez dans votre maison le petit morceau de bois consacré avec le nom de Dieu (une mezuza), faites-le baiser à vos enfants, le matin à leur lever, le soir quand ils iront prendre le repas de la maison, mais envoyez-les dans les écoles laïques. »
Le vieux Franc-Maçon savait bien qu’au bout de quelque temps,
1. Le serment more judaïco a été rétabli en Alsace-Lorraine depuis l’annexion. On le fait prêter aux recrues israélites sur le sepher déroulé, en présence du rabbin.