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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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CRÉM1EUX ET L'ALLIANCE ISRAÉLITE UNIVERSELLE

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sésh Cest par un fait darmes digne des temps héroïques, dans un combat singulier quil avait gagné la croix dofficier, en tuant de sa propre main, au milieu de ses partisans, lagitateur Bou Barghla.

Quand un officier français transmit au Bach-Aga le décret de Crémieux, il cracha dessus et le retourna à lenvoyeur en disant simplement : « Je nobéirai jamais à un Juif! »

Cet homme qui avait toutes les générosités ne voulut pas attaquer la France aux prises avec lAllemagne . Il attendit chevaleresquement que nous pussions disposer de toutes nos forces pour lutter. Ce fut alors quil renvoya sa décoration au général Augeraud et quen le remerciant courtoi­sement des égards quil lui avait témoignés, il lui adressa la déclaration de guerre qui se terminait par ces mots : « Si jai continué à servir la France , cest parce quelle était en guerre avec la Prusse et que je nai pas voulu augmenter les difficultés de la situation. Aujourdhui, la paix est faite et jentends jouir de ma liberté. »

Mokrani tomba en héros; il se fit tuer, ne voulant ni servir la France déshonorée, ni combattre plus longtemps un pays quil avait aimé, un pays dont il avait été lhôte dans les fêtes de Gompiègne et de Fontainebleau . Pour être plus sur de mourir, il quitta, lui, le cavalier sans rival, ce cheval qui peut-être, dans un élan désespéré, eut arraché son maître au péril. « Cétait dans lOued-Zeloun; il rencontra nos zouaves qui couronnaient un mamelon; il pouvait passer; il attaqua;et comment? Il descendit de cheval, lui, le grand seigneur, et, à pied, à la tète de sa troupe hésitante, il gravit la côte et marcha en avant jusquà ce quune balle vienne le frapper au front. Il espérait que sa mort, annoncée par lui depuis plusieurs jours, mettrait fin à linsurrection 1 2 . »

Sidi Mokrani, en tous cas, navait pas obéi à des Juifs. Parmi les offi-

1. Il prétendait, on le sait, descendre d'un Montmorency qui, surpris par une tempête, se serait fixé en Algérie ; et par plus d'un point la destinée de ce chef intrépide, victime des sentiments les plus élevés, et poussé comme malgré lui à une révolte contre laquelle son cxur protestait secrètement, rappelle le sort tragique du vaincu de Castelnaudary .

La presse juive , pour déshonorer Mokrani, a soutenu que cétait la situation embar­rassée de ses affaires qui l'aurait poussé à la révolte. Rien nest plus faux. Les dettes mêmes de Mokrani avaient lorigine la plus honorable. Lors de la terrible famine de 1867-1868, il avait, avec sa magnanimité habituelle, emprunté des sommes considérables pour donner du blé aux hommes de ses tribus. Le Maréchal Mac-Mahon lui avait engagé sa parole que sil nétait pas remboursé aux échéances par ses débiteurs, la France lui payerait ce quil avait avancé pour un service public sur les centimes additionnels des tribus. Le gouvernement de de la Défense, qui gaspillait l'argent pour enrichir des fournisseurs comme Ferrand, refusa, naturellement, de faire honneur à lengagement du Maréchal, et lon dit au Bach-Agha : * Tire-toi de comme tu pourras. »

2. Plaidoyer pour Bou-Mezrag devant la cour dassises de Constantine (27 -avril 1873.)