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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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LA FRANCE JUIVE

Ce qui est intéressant, cest de voir comment cette question se termina devant lAssemblée nationale. Vous croyez peut-être que, parmi ces catho­liques qui forment la majorité, un homme va se lever, souffleter de son mépris le fanatique vieillard qui, dans lintérêt des siens, a déchaîné lépouvantable insurrection qui a coûté la vie à tant de Français ! Vous supposez quune voix tout au moins sélèvera pour rendre hommage à tous ces Arabes tués dans la guerre dAllemagne , pour la défense dun pays qui leur avait enlevé leur indépendance !

Vous connaissez mal les conservateurs catholiques; ils sont habiles avant tout; ils nosent déplaire à Rothschild , proclamer la vérité, montrer les choses telles quelles sont. Ils souriaient déjà dun air malin dès cette époque, et semblaient dire : « Laissez-nous faire ! » Encouragés par le succès de leur habileté, ils sourient encore aujourdhui, et, différents des braves gens dautrefois qui sont morts en affirmant leur opinion, ils souri­ront encore dun air de plus en plus malin sur la charrette qui les emmè­nera au supplice. « Le fin sourire » dun politique conservateur ! quel poème !

février 1886. On sait que Henri Rochefort avait pris l'initiative de cette proposition, que fit échouer Krzyzanowski, plus connu sous le nom de Sigismond Lacroix , et qui, en sa qualité de Polonais, eût été presque excusable de chercher à rendre la liberté à Berezowski. Le pam­phlétaire profita de loccasion pour exécuter son collègue de lextrême gauche quil convainquit, preuves en mains, dans le numéro de lIntransigeant du 28 janvier 1886, d'être un agent provocateur. Il est rare, lorsque deux républicains s'expliquent ensemble, quon napprenne pas quelque vérité.

Tout ce point est à étudier soigneusement. Rien de curieux comme la colère des députés juifs qui sont hors d'eux-mêmes à la seule pensée damnistier ces Arabes, prisonniers déjà depuis de longues années. Etienne ne sait plus même ce qu'il dit : « Ignorez-vous, s'écrie, t-il, quus ont incendié des fermes, des femmes et (tes enfants? » Thomson déclare quon ne peut libérer ces captifs parce que lon a profité de la Circonstance pour voler leurs biens et quil faudrait les leur rendre. Camille Dreyfus se prononce énergiquement contre la propo­sition.

Henri Rochefort , qui na jamais réfléchi, est, dans ce cas particulier, par son seul instinct dêtre indépendant, un politique très prévoyant. Ce nest pas le moment pour nous, en effet, dabandonner lespèce de droit nouveau qui admettait que les peuples soumis par la force défendent leur indépendance. La France est, ou plutôt était, avant de tomber aux mains des Juifs, un pays de pur sentiment ; lAllemagne , pays de raisonnement, au contraire, lient à pouvoir formuler une théorie à lappui de ses actes. Le refus de tout pardon, limplacabilité montrée à des patriotes révoltés, le droit, affirmé crûment par Thomson, de semparer des biens des insurgés, sont des précédents que la Prusse enregistre soigneusement, et qui lui serviraient, à loccasion, à exercer toutes les violences contre les Alsaciens -Lorrains qui voudraient secouer le joug.

La Russie tenait également à faire nier par un Polonais ce droit à 1 insurrection que Pologne a si souvent revendiqué contre ses oppresseurs, et elle sest servie de Krzyzanowski. Tout cela, encore une fois, est utile à regarder, au point de vue de lévolution des idées, montre bien la fin de la légende de la France révolutionnaire, émancipatrice de nations, généreuse, pardonnant vite à ceux mêmes quelle a été obligée de combattre. 11 ny a plus que l'intérêt du Juif qui touche nos Assemblées françaises.