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LA FRANCE JUIVE
passions expliquent seules ! Quelle tristesse de rencontrer là Berryer ! Le jeu ! « Prions Dieu, dit saint Paul, de ne nous envoyer que des tentations qui soient ordinaires. »
L’impression que laisse cette demeure est une impression de fatigue plus que d’admiration. C’est un fouillis, un capiiarnaüm, un prodigieux, un incroyable magasin de bric à brac. Tous ces objets, rapportés de tous les coins de la terre, jurent entre eux ; ces dépouilles opimes de l’univers ne s’harmonisent pas ; ces manifestations de tant de civilisations différentes grincent de ce rapprochement b
L’amour du bibelot ou plutôt le sentiment juif de l’acquisivité, de la possessivité est poussé d’ailleurs jusqu’à la puérilité. Un petit pot de grès de Flandres, qui vaut six francs, sert de vis-à-vis à une assiette d’Oiron ou aune figurine en pâte tendre. Les bons Sémites de l’Hôtel des Ventes n’ont pu résister à la tentation d’abuser ceux même qu’ils nomment avec tant de vénération : « Les barons. » Plus d’un objet est moderne; beaucoup de pièces d’orfèvrerie, notamment, me paraissent avoir reçu tardivement ce que M. Paul Eudel , dans son livre sur le Truquage, appelle « le baptême des poinçons français . »
Le parc, quelque vaste qu’il soit, n’a pas le noble aspect des avenues Louis Quatorziennes. A la place des Rothschild vous auriez commandé à nos sculpteurs, qui luttent si péniblement au milieu de circonstances peu favorables pour leur art, tout un monde de statues, des marbres, des bronzes. Le duc d’Aumale a agi ainsi pour Chantilly , il a demandé un La Bruyère à Thomas, un Therme à Lanson, un groupe de Pluton et de Pro serpine à Chapu. Il y a à peine, dans tout Ferrières, une demi-douzaine de statues qui ont à peu près la valeur de celles qui décorent l’entrée des établissements de bains *.
1. C'est évidemment en pensant k la collection des Rothschild que de Concourt a écrit : illya des collections d'art qui ne montrent ni une passion, ni un goût, ni une intelligence, rien que la victoire brutale de la richesse. »
2. Le baron Alphonse de Rothschild , si indifférent aux efforts de nos artistes, si fermé aux nobles et généreuses traditions de nos patriciens d’autrefois, n’en eut pas moins l'effronterie, au mois d'avril 1885, de se présenter à l’Académie des Beaux-Arts . Cette fois, au milieu de tant de servilité et de tant de vilenies, il y eut un réveil de pudeur, et quelques hommes indépendants réussirent à faire comprendre à l’Académie que l’amour de l’art et l’achat de bibelots à bon compte n’ont absolument rien de commun. Malgré la campagne patriotique d’Ephrussi et d’Albert Wolff qui consacra trois colonnes à prôner cette candidature, le baron fut honteusement éconduit. Un autre se serait retiré; mais le sentiment de la dignité est absolument inconnu au Sémite qui supporte tout pour arriver à son but. Le baron acheta les uns, flatta bassement les autres, accepta toutes les humiliations qu’on voulut, et finit par être nommé au mois de décembre suivant.