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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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PARIS JUIF ET LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE

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Tout Paris a vu, pendant de longues années, un ancien ministre de lintérieur, un vice-président de la Chambre, tenir publiquement un véri­table tripot, un Cercle ouvert à tous : Le Cercle artistique de la Seine , quon appelait familièrement le Cercle Lepère. Dans tous les hôtels descen­dent les riches étrangers, dans tous les grands cafés du boulevard, on dis­tribuait des invitations à venir dîner et faire la partie, et ces invitations étaient signées du vice-président dune Assemblée française) Jamais les membres de la gauche nont pensé que la dignité du pays fût atteinte par 1 ce singulier cumul ; ils trouvaient que ce teneur de brelan était encore le plus honorable dentre eux, puisquils lavaient appelé à la vice-présidence. Dans lhistoire même du Directoire , je ne connais pas de fait analogue h

On ne saurait trop, néanmoins, encourager le gouvernement à récom­penser de préférence ses fidèles par des permissions de tripot que par des fournitures. En ce dernier cas, cest la sécurité même de la France que compromet le bon plaisir ministériel.

La discussion du 28 février 1881, sur les fournitures accordées aux industriels de Besançon , suffit à montrer comment les choses se passent pour les adjudications. M. Georges Perin, avec un patriotisme et une clairvoyance qui surprennent chez un républicain, émit cette idée qui frappa la Chambre détonnement, que généralement les places frontières étaient les premières assiégées en temps de guerre, et que les magasins et les ateliers dhabillement nécessaires à larmée étaient plus convenable­ment installés à lintérieur. Si les fournitures avaient été maintenues à

les carrières dAmérique. M. Andrieux a raconté, dans ses Souvenirs, que la première per­sonne quun commissaire de police, envoyé par lui, rencontra dans un Cercle autorisé, fut un repris de justice endormi sur une banquette. « Ne sachant trouver un abri, cette victime de la justice humaine était venue chercher, dans les salons de jeu, un gîte hospi­talier. Le Cercle était dailleurs présidé par un député. »

1. Le gérant de ce Cercle était un Juif nommé Landau, uu personnage à aventures bruyantes, comme tous ceux de sa race, qui se suicida après des pertes dargent et des peines de cœur que les journaux boulevardiers racontèrent tout au long. Il fut remplacé par deux autres Juifs, les frères Khan, autrefois directeurs du Cercle de Paris , rue Laifitte.

Un député radical de Seine-et-Oise , ancien avocat général, M. Vergoin, prit la succes­sion de Lepère, comme président. Il n'avait dautre but, déclara-t-il ingénument « que de se faire de belles relations. » La première rencontre qu'il fit, dans cet endroit distingué, fut celle d'un gentleman qui lui confia que les croupiers venaient de lui proposer de lui remettre un certain nombre de portées toutes préparées, des biscuits comme on dit, qui lui auraient permis de prendre la banque à coup sûr. M. Vergoin craignit sans doute que les relations quil se ferait ne fussent un peu mêlées et donna sa démission. Remarquez encore une fois au point de vue du chemin parcouru depuis 1870, de laccoutumance, que le fait pour un représentant du peuple d'accepter la présidence dun tripot ne choque personne ; cela paraît tout naturel.