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LA FRANCE JUIVE
talent que M. Meissonier ; elle aurait eu affaire à un artiste qui se serait conduit envers eHe en homme bien élevé, et elle n’aurait pas été diffamée dans les gazettes.
Quand il n’a plus d’autre occupation en ville, Meyer organise des fêtes avec les duchesses. Lors de la fête des Alsaciens-Lorrains, c’est lui qui devait ouvrir le bal avec la comtesse Aimery de la Rochefoucauld. Au dernier moment, la pauvre comtesse eut honte et se contenta de faire un tour dans la salle au bras du petit youtre. L’exhibition n’est-elle déjà pas assez triste comme cela 1 ? Pour moi, je l’avoue, ces abaissements m’affligent toujours. N’est-ce point navrant, ce joli nom d’Aimery, qui a je ne sais quel parfum Moyen Age , et fait songer à l’Aymerillo de Victor Hugo , ce grand nom de la Rochefoucauld, qui rappelle des siècles d’héroïsme, des batailles gagnées, les Maximes, — tout cela, sali par la promiscuité d’un ancien secrétaire de Blanche d’Antigny ? Je suis un peu comme Yeuillot et je trouve «que ces gens-là me trahissent personnellement, me volent quelque chose » en disposant d’un nom dont ils n’ont pas le droit de disposer.
Ne vous y trompez pas, néanmoins, Arthur Meyer est la seule personnalité littéraire que les gens du monde puissent endurer 2 . Après les livres,
1. L'amour des Juifs, d'ailleurs, est très développé dans cette famille. C'est une parente de la comtesse Aiin ry — si ce n’est la comtesse elle-même — qui faillit se noyer par amour de la Juiverie. Elle était dans sa villa du lac de Genève, lorsqu’on lui annonça que la baronne de Rothschild venait de Preigny la voir dans son bateau à vapeur. Transportée par l’honneur d'une telle visite, la comtesse s’élance, renverse tout sur son passage; sur la passerelle qui conduit au bateau, elle veut prendre les trois temps de la révérence comme à Versailles , elle tombe à l'eau, et les Juifs se livrent, à propos de cette chute, à des plaisanteries d’un goût douteux.
2. Il y a des exceptions, cependant, mais elles se produisent toujours en faveur des Israélites . Le Juif, flatteur, insinuant, cajoleur, endort le patricien, le berce doucement;le Français , qui lui dirait franchement la vérité, qui lui apporterait l’écho de la vie, le déconcerterait, le troublerait, le réveillerait.
Le duc de Chaulnes, dont la mère a été abreuvée d’outrages par la presse juive , fut le dévoué protecteur d'Eugène Müntz , dont nous parlions tout à l’heure ; il l’aida à continuer ses travaux, et la veille de sa mort, il prit, par une touchante prévoyance, les dispositions nécessaires pour assurer la publication du volume qui a pour titre : La Renaissance en Italie et en France à l’époque de Chartes VIII.
M. Müntz, du reste, a rendu un juste hommage au duc de Chaulnes, et c’est plaisir que de voir apparaître, en quelques pages de son introduction, cette bienveillante figure de grand seigneur cur eux de tout, s’intéressant à tout, venant avec des béquilles, après avoir été grièvement blessé à Coulmiers, passer ses examens de droit à Poitiers , étudiant les questions ouvrières, publiant un remarquable travail sur les sculptures connues sous le nom de Saints de Soiesmes.
Les Montesquiou, également, aidèrent beaucoup le célèbre médecin Worms à ses débuts, mais aucun grand seigneur, encore une fois, ne ferait pour un Chrétien ce qu’il fait pour un Juif qui sait l’entortiller, le prendre.