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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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LA FRANCE JUIVE

Quand il lagit dun Juif ou d'une Juive, en effet, les conditions ordi­naires de la morale sont changées. Vous avez vu Wolff battre la caisse sur le corps dune pauvre comédienne des Variétés; Meyer ne veut point se laisser distancer. Rachel a eu des bâtards : il en est question, en 1883, dans un procès intenté par M me * Lia et Dinah Félix aux héritiers de Sarah. Ce sont de ces faiblesses excusables dans la vie dune artiste, et semblables, après tout, à celles que les débats des tribunaux relèvent chaque jour. Le Gaulois nentend pas de cette oreille-; il vous démontre, en trois colonnes, que ces bâtards sont des amours de bâtards, des bâtards comme on nen l'ait plus, des bâtards comme on nen avait jamais fait avant Rachel, et -dessus apothéose obligatoire de la race incomparable.

Quoique jaie déjà effleuré ce point plus dune fois dans le cours de cette étude, je ne crains pas dy revenir, car il est essentiel. Le Chrétien est tou­jours en train de rougir de quelquun ou de renier quelque chose, de dire à son frère embarrassé : Nescio vos. Le Juif est absolument fermé à tout sentiment bête de ridicule ou de fausse pudeur; il méprise profondément lopinion, peut-être parce quil sait comment on la crée.

Prenez un exemple dans un autre ordre. Il sagit ici, je le déclare dun femme parfaitement respectable; elle sappelait Agathina, et elle était modiste. Supposez un Chrétien ayant une femme exerçant la profession de modiste et portant le nom dAgathina, il ne sen vantera pas. Notre con­frère Alexandre Weill nest point de cet avis ; il publie un poème intitulé : Agathina, ma femme; et il déclare que rien na été aussi spirituel, aussi séduisant, aussi modeste que cette modiste :

Oh! mon Agathina! je tinvoque à genoux!

Lève-toi dans ta tombe et, tout debout, dis-nous, Toi qui fus chaste et pure et dont le moindre verbe Fut toujours si loyal et parfois si superbe,

Dis-nous ce que tu fus, dès lâge de vingt ans?... La vertu réunie aux labeurs incessants.

Tu portes sur ton front un nimbe, une auréole,

Dont le charme opéra jusque dans ta parole ;

La première au travail, la dernière au repos,

envoyait un petit chef-dœuvre de grâce et desprit que Rachel navait quà recopier. Nest- ce pas gentil, cet avocat occupé sans relâche, dont le cabinet est envahi depuis le matin jus­quau soir, et qui trouve le temps de rendre dune maniéré assidue un service, subalterne en apparence, mais qui a, à ses yeux, lavantage de grandir une coreligionnaire? Citez-moi donc un catholique qui en ferait autant? En revanche, Rachel aurait appris, dans le lit dun prince ou d'un homme dÉtat, une nouvelle intéressante pour la politique européenne, quelle en aurait immédiatement prévenu Crémieux. Voilà comment les Juifs sont toujours admira­blement informés ; ils saident entre eux.