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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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PARIS JUIF ET LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE

faute de la République , je dois constater quil y a une quantité de banque­routes. Les meilleures maisons de commerce sont fermées ou en liquida­tion; les théâtres, à peu dexceptions près, font de mauvaises affaires; les trottoirs bitumés sont en plus mauvais état quà Londres , grâce à notre administration de paroisse.

Toutes les classes sont sous lempire dun malaise. Les seules personnes convenablement mises sont les Anglaises et les Américaines . Paris est in extremis. Je ferme les yeux, pour réveiller en moi limage des temps dau­trefois, des étalages splendides des magasins, des rues éclairées à jour, des femmes élégantes, des équipages magnifiques, des uniformes brillants, le bruit et le mouvement dune ville en habit de dimanche continuel. Je rouvre les yeux, et je trouve une population misérablement vêtue, des exhibitions pauvres darticles démodés à Londres , et au-dessus de tout cela sous un ciel gris, on lit le mot : « Ichaboë » (île de la côte occidentale dAfrique , fameuse par son guano).

La ville, la vie jadis était si débordante, les pavés eux-mêmes riaient aux passants, donne un peu la sensation de Munich . Au mélanco­lique et glacial München , il manque de la gloire, du mouvement pour remplir ce décor de palais, de temples érigés aux grands hommes absents, davenues magnifiques. Paris a eu cette gloire, il est plein de souvenirs dhéroïsme et de grâce, de légendes immortelles, de fantômes illustres, mais tout cela semble appartenir à un passé pour toujours aboli. Certaines régions ressemblent à des Pompéi et on se demande quelle catastrophe les a rendues tout à coup silencieuses et désolées. Ailleurs, lactivité est fébrile, mais avec une sorte dinquiétude sombre qui persiste malgré tout.

Les hôtels du faubourg Saint-Germain gardent leurs volets fermés pen­dant dix mois de lannée. Presque tous les beaux hôtels du quartier des Champs-Elysées et du quartier Monceaux sont aux Juifs; parfois, par les fenêtres ouvertes, on entend dans la solitude les échos de quelque con­cert, cest un Juif quelconque qui soigne sa névrose.

I.e livre si français , le livre qui fait penser, le livre qui tenait tant de place au xvii 0 siècle nexiste plus ; cest la musique, art tout sensitif, art da- mollis et de maladifs, qui tient le premier rang. Après le crocodile, le Juif est le plus mélomane de tous les animaux. Tous les Juifs sont musiciens ou comédiens dinstinct. Camondo joue du violoncelle. M me Goldschmidt donne de superbes concerts « dans des salons qui sont en enfilade. » Entre deux morceaux, Bemberg, que la renommée dHaydn empêche de dormir, prie M ra6 Isaac de chanter une petite romance. Le Clairon, lorsquil vivait, voulait bien nous apprendre que le programme cette fois est imprimé « sur une feuille de vélin couleur orange rongée par un volcan ! » « Quelle jolie décoration, que de chefs-dœuvre! » sécrie Meyer toujours ravi. « En péné-