LA PERSÉCUTION JUIVE
131
Messieurs,
Il m’a paru que nous ne pouvions pas laisser la terre se refermer sur l'homme de bien que nous accompagnons aujourd’hui au seuil du néant, sans qu’une voix se fit entendre sur sa tombe au nom du Conseil général de l’Ain, où M. François Guillot tenait une si digne et si large place.
Permettez-moi donc, Messieurs, à moi, le plus humble entre tous, de redire à la population éplorée de cette ville que si la perte qu’elle fait en ce jour est immense , autant que difficile, j’allais presque dire: impossible à réparer, vous n’êtes pas, loin de là, seuls à la ressentir.
Dans les endroits les plus reculés de l’arrondissement de Trévoux, et je puis dire dans tout le département, la nouvelle de la mort de Guillot a eu- un douloureux retentissement. Ah! c’est que notre collègue, notre ami , M. Guillot, n’était pas seulement un citoyen éclairé, intègre et dévoué; il n’était pas seulement un père de famille, bon, aimé et respecté des siens; il n’était pas seulement le premier magistrat d’une cité qui conserve précieusement le souvenir des bienfaits de son administration.
M. Guillot, et je suis heureux de le rappeler, était le conseiller, le protecteur, l’ami de tous, du petit comme du grand, du pauvre comme du riche; son action bienfaisante et généreuse ne connaissait pas de limites; elle s’étendait non seulement sur sa ville d’adoption, sur son canton, sur l’arrondissement de Trévoux tout entier, mais encore sur ceux qui, de tous les points du département, venaient auprès de lui, surs d’y trouver un accueil bienveillant, un appui désintéressé.
Je ne puis mieux terminer ces quelques paroles, Messieurs, qu’en rappelant l’éloge si mérité qu’en fit M. le Préfet, un jour que nous le regardions avec tristesse se retirer haletant, épuisé par la fatigue et par la maladie, au milieu d’une séance qui devait être la dernière pour lui :
« Si le soldat qui va mourir sur le champ de bataille, disait M. Ste- helin, est digne d’admiration, nous ne devons pas moins admirer le courage de Guillot, qui, lui aussi, a voulu mourir sur la brèche. »
Adieu, Guillot, notre excellent et regretté collègue, adieu !!!
Quant, à Bollet, premier adjoint, il fut court, mais ferme; il s’écria avec conviction :
Il n’est plus, cet administrateur intègre autant qu’habile dans lequel notre pays plaçait sa plus entière confiance, ses plus chères espérances : car, si Guillot n’est pas mort à la fleur de l’âge, du moins il a succombé dans le plein exercice de ses grandes facultés.
Il n’est plus, cet homme équitable qui eut le mérite si rare de réduire ses ennemis au silence, de les forcer à l’admiration par l'excès de ses bienfaits.
Il n’est plus, cet ami dévoué, infatigable à servir les intérêts des autres, peu soucieux, d'ailleurs, de ce qui le regardait personnellement.
Mais, Messieurs, s’il ne reste rien de cette nature vigoureuse qui a lutté jusqu’au dernier souffle pour la cause de Injustice, la mémoire de cet homme de cœur est impérissable. Il restera pour nous le modèle de toutes les vertus civiques.