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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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LA PERSÉCUTION JUIVE

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Le cœur rempli dune maternelle pitié, elle sen va, à moitié hors delle-même, de place en place, partout. elle pouvait supposer trouver son petit enfant. Et sans cesse elle criait vers la Mère du Christ douce et bénigne, et elle alla enfin tout droit le chercher parmi les Juifs maudits.

Elle priait et suppliait piteusement tous les Juifs quelle rencontrait de lui dire si par hasard son fils avait passé. Ils disaient : non. Mais Jésus, par sa grâce, lui mit en pensée de pousser des cris vers son fils à lendroit même on lavait jeté dans la fosse.

O grand Dieu , qui tires ta louange de la bouche des innocents, telle est donc ta puissance! Cette perle de chasteté, cette émeraude, bien plus, ce brillant rubis du martyre, gisait, la gorge coupée, et il se mit à chanter ' Alma Redemptoris mater,si haut que toute la place en retentit.

Le peuple chrétien, qui passait dans la rue, entra pour admirer ce prodige, et en toute hâte on envoya chercher le prévôt. Il arriva aussitôt et sans tarder, et loua le Christ, qui est le roi du Ciel, et puis sa Mère, honneur de lhumanité, puis il fit lier les Juifs.

Avec de profondes lamentations, on retira lenfant qui chantait tou­jours son chant ; et, avec honneur et grande procession, on le transporta à labbaye voisine. Sa mère gisait évanouie près de la bière; et cest à peine si les gens qui étaient purent en arracher cette nouvelle Rachel.

Le prévôt fit périr chacun de ces Juifs avec tourments et honteuse mort, et cela sur-le-champ. Et il ne put sempêcher de les maudire en disant: Celui- aura le châtiment qui mérite le châtiment. Il les fit donc traîner par un cheval fougueux, puis suspendre de par la loi.

Et notre innocent reposa sur sa bière devant lautel, tandis quon disait la messe. Puis labbé et son couvent engagèrent les bonnes gens à le faire enterrer de suite. Et quand on jeta sur lui leau bénite, lenfant, arrosé de cett.è eau sainte, parla de nouveau et chanta Alma Redemptoris mater!

Cet abbé, qui était un saint homme (comme le sont les moines, ou du moins devraient lêtre), se mit à conjurer le jeune enfant et dit : « O cher enfant, je timplore en vertu de la Sainte-Trinité, dis-moi donc quelle raison tu as pour chanter,- puisque ta gorge est coupée, ce me semble. »

« Ma gorge est coupée jusquà l'os de mon cou, dit cet enfant, et par voie de nature jaurais mourir il y a longtemps. Mais Jésus-Christ, comme vous le trouvez dans les livres, veut que sa gloire demeure et reste grande dans les esprits, et pour lhonneur de sa Mère chère, je puis chanter encore Alma, haut et clair.

« Cette fontaine de merci, du Christ douce Mère, jelai toujours aimée. Et sur le point de mourir je la vis venir à moi; et elle m'ordonna de chanter