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LA FRANCE JUIVE
mis à la mode; mais qu'est-ce que cela peut faire â Dreyfus , dès qu’il s’agit de molester les chrétiens ?
Cet épisode, en tout cas, met bien en relief le côté Gotin qui se môle dans ces persécutions au côté coquin, la fureur du cuistre contre ceux qui s’obstinent à ne pas admirer sa littérature. « Ce que l'Almanach des Muses, a dit Chateaubriand , a fourni d’agents à la Terreur est incroyable. La vanité des médiocrités en souffrance produisit autant de révolutionnaires que l’orgueil blessé des culs-de-jatte et des avortons : révolte analogue des infirmités de l’esprit et de celles du corps. »
Sous ce rapport, Compayré a peut-être dépassé Paul Bert par son opiniâtreté à imposer son manuel, à peser sur les ministres en les menaçant de son vote pour que ce manuel, que rejetait tout le monde, filt rendu obligatoire. En 1883, toujours sous la pression de Compayré, le préfet de la Manche révoqua, non pas une institutrice laïque, mais une religieuse qui ne pouvait, on en conviendra, accepter un ouvrage condamné par le Pape, M me Fontaine, en religion sœur Thérèse, du Carmel d’Avranches . Quelque temps auparavant, l’impudent Ferry déclarait « qu’il n’y avait aucun manuel autorisé dans les écoles *. »
Partout, je le répète, vous rencontrez le Juif pour diriger et envenimer les débats religieux.
Prenez cet épisode de la seconde expulsion des Bénédictins de Solesmes, qui eut un caractère particulièrement révoltant.
Ces pauvres gens, mis à la porte une première fois, sont rentrés petit à petit chez eux. Ils n’ont pas de fortune, en effet; ils ne peuvent vivre en dehors du monastère où ils ont installé leur vie, où leur bibliothèque est restée, où ils ont ces habitudes de travail qui sont, chacun de nous le sait, si importantes pour les lettrés.
Parmi les radicaux, mômes violents, beaucoup, sachant cela, auraient gardé le silence en se disant que les représentants de cet ordre, qui a sauvé la civilisation au Moyen Age , qui a recueilli dans les cloîtres les chefs- d’œuvre de l’esprit humain, sont un peu nos confrères.
Le Journal Paris organise une véritable campagne de délation contre
1. C’est ce Compayré, célébrant dans ses manuels le suffrage universel, qui, dans une réunion publique pour les élections de 1885, lança une botte de foin aux électeurs qui sifflaient le candidat opportuniste.
— Vous avez tort, monsieur le député, lui dit un paysan, de vous priver de votre déjeuner de demain.