LA PERSÉCUTION JUIVE
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ces religieux qui unissaient la science et la foi, l'amour de Dieu et l’amour des lettres *.
J ai attaqué violemment M. Charles Laurent à ce sujet, et après avoir croisé le fer avec lui dans une rencontre loyale, il ne m’en coûte pas de déclarer que, sans rien modifier de mon appréciation sur le rôle honteux joué là-dedans par le journal, je regrette la vivacité de certaines attaques personnelles.
M. Charles Laurent, après tout, n’est pas le propriétaire du Paris . Le vrai coupable c’est Yeil -Picard. Il connaissait le caractère de Freycinet; il savait que ce Pilate cède toujours, qu’il est toujours prêt à sacrifier le Juste, et qu’il n’hésiterait pas, pour avoir la paix, à se déshonorer en expulsant des hommes, dont il avait été l’hôte, le protégé, l’obligé; il le mit en demeure d’agir.
Voilà ce dont il faut qu’on se souvienne, car la race se peint là tout entière. Nous sommes incapables d’actes de cette nature.
Quand les Juifs seront de nouveau au ban de l’Europe , nous saurions que des rabbins se réunissent pour Myauder 1 2 que nous ne les dénoncerions pas.
Officiers, qui m’avez fait par centaines l’honneur de m’écrire, faites lire ce passage à vos camarades. Quand on se présentera pour mettre Veil- Picard et ses congénères à la porte de chez eux, ils protesteront, ils parleront de la tolérance, de l’inviolabilité du domicile. Répondez à Veil-Picard : « Juif, voilà ce que tu as fait. Ges bons Pères qui cherchaient de vieux textes ne te gênaient en rien; tu as demandé qu’on les expulse! A ton tour maintenant! Patere legem quam fecisti. »
Cette transmission par l’hérédité des haines religieuses ou des instincts anti-sociaux est un des spectacles qui nous ont le plus frappé dans le cours de cet ouvrage. Sans accorder à l’hérédité le caractère fatal que lui attribue la science moderne, il faut admettre qu’elle joue un rôle considérable dans
1. Voir le Paris des 20, 21, 22, 23, 26 et 27 février 1882.
2. Myauder c’est se réunir pour étudier la doctrine talmudique, la Kulacca. D’après le Talmud , traité Sirassin, Dieu lui-même, après avoir quitté le Temple, s’est réservé dans le ciel un certain lieu grand de quatre coudées où il myaude une partie de Ta journée.
Dans Yeschuot, traité de Abodu-Zara (Culte des païens), chap. I« r , on lit : Le jour a douze heures. Pendant les trois premières Dieu myaude; pendant le deuxième quart, Dieu est assis et juge le monde entier, mais voyant que le monde entier est coupable, il se lève de son siègj'de justice et s’assied sur son siège de miséricorde. Pendant le troisième quart de la journée, Dieu est assis et nourrit le monde entier, depuis les rhinocéros jusqu’aux puces ; pendant le quatrième quart, Dieu est assis et joue avec le Leviathan, comme il est dit dans tes Psaumes : « Ce Leviathan que tu as créé pour jouer avec lui. »