LA PERSÉCUTION JUIVE
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plus croyable et qui est le plus cru. Il y a cet adage criminel : « Plus le témoin est petit, plus il pèse ! »
C’est là-dessus que comptent les Francs-Maçons qui excellent dans ces préparations de procès d’attentats à la pudeur. On fait croire l’enfant à la réalité de certains faits qui n’ont jamais existé, on lui fait apprendre une leçon qu’il répète par vanité pour ne pas avoir l’air de manquer de mémoire. Sous ce rapport, les organisateurs sont d’une habileté incroyable dans le choix de leurs sujets. Dans un village où j’habitais, les Frères étaient adorés, les mêmes instituteurs étaient là depuis vingt ans, ils avaient élevé tout le pays. Un jeune Frère arrive, un scandale se produit, et il se trouve que le père de l’enfant, qui se prétendait victime, avait été condamné jadis à vingt ans de travaux forcés pour attentat à la pudeur. Évidemment il y eut, en cette occasion, soit corruption par le père, soit prédisposition maladive héréditaire chez l’enfant à porter son imagination sur certaines idées.
Parmi d’innombrables affaires de ce genre, dont le récit allongerait indéfiniment ce livre, je prends au hasard l’affaire de l’abbé Mulot.
L’abbé Mulot, curé de Saint-Leu,' à Amiens , était un vénérable prêtre de 71 ans, qui avait traversé la vie en faisant le bien. Pendant le choléra de 186G, il avait bravé cent fois la mort en prodiguant ses soins aux malades, et les habitants du faubourg de Ham s’étaient cotisés pour lui offrir une couronne d’or à titre de souvenir.
Quand on demanda à un témoin, M. Hocquet, maire de la commune de Templeux-le-Guérard, où l’abbé Mulot avait été curé, quelle était alors sa réputation, il répondit simplement : « Si j’avais voulu amener ici quatre cents personnes de Templeux pour témoigner en faveur de M. l’abbé Mulot, elles seraient venues en masse. »
L’abbé Mulot avait dû défendre les droits de l’Église contre la ville d’Amiens . Dauphin, le protecteur et l’ami d’Erlanger, et Goblet, qui vaut encore moins que lui, avaient été indignés d’une telle audace. Il fut résolu qu’on perdrait le pauvre prêtre, « qu’on monterait un coup, » pour employer l’expression d'un des témoins. Une institutrice qui, avant d appartenir à renseignement, avait fait partie d’un cirque ambulant, vint raconter que des enfants auraient reçu du curé ce qu’ils appelaient « des leçons naturalistes ».
Le procès eut lieu au mois de juin 1882. Robinet de Gléry, chargé de la défense de l’accusé, fut magnifique; mais ne l’eût-il pas été, que la cause de la vérité aurait triomphé quand même. Le président du tribunal était un