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LA FRANCE JUIVE
honnête homme et un homme d’esprit. Après deux ou trois questions, il sut à quoi s’en tenir sur l’innocence des enfants ; ils avaient en effet figuré déjà deux ou trois fois dans des affaires d’attentat aux mœurs. C’était une spécialité chez eux; la Franc-Maçonnerie les promenait de département en département. L’arrêt fut très explicite sur ce point :
En ce qui concerne l’outrage public à la pudeur :
Attendu, que s’ils avaient existé, les gestes indécents, objets.de cette seconde inculpation, en raison même de leur gravité, n’auraient pas manqué, dès le premier jour, d’être dévoilés par les enfants, dont deux au moins avaient été antérieurement mêlées comme victimes ou comme témoins dans des procès de mœurs;
Attendu, néanmoins, que lors de l'enquête de M. l’inspecteur Camus, il n’a été en aucune façon question de ces actes, et que c’est le lendemain, devant M. le commissaire de police, que deux enfants ont commencé à en parler;
Attendu que la défense, pour infirmer ces témoignages, ajustement relevé les nombreuses contradictions qui existent entre les déclarations des différentes petites filles, non seulement sur les gestes dont s’agit, mais encore sur d’autres circonstances accessoires de la scène, contradictions d’autant plus inexplicables que les faits se seraient accomplis sous leurs yeux, dans un espace relativement très restreint;
Attendu que l’instruction et les débats ont, du reste, révélé la pression exercée par une personne (l’institutrice laïque Melle) sur les enfants, et dont Y animosité contre l’inculpé ne saurait être mise en doute;
Attendu que la moralité inattaquable de l’abbé Mulot et tout son passé protestent contre ce nouveau chef de prévention;
Par ces motifs ;
Le tribunal renvoie l'abbé Mulot des fins de la poursuite sans dépens.
Une enthousiaste ovation fut faite au sortir de l’audience au malheureux vieillard qui, très fort devant la persécution, faillit s’évanouir de joie en voyant combien il était aimé. Un de nos confrères, M. Nicolas Bossu, ouvrit dans son journal le Courrier de la Somme, une souscription qui fut presque aussitôt couverte et qui servit à l’achat d’un calice d’or '.
L’institutrice flétrie par le tribunal reçut naturellement l’avancement qu’elle méritait, elle fut appelée à une position à Paris .
1. Au mois de juin 1885, la rentrée de l'abbé Fyten, après son acquittement par la cour d’assises de Douai , fut aussi un véritable triomphe. Une foule immense était accourue à la rencontre de l’excellent prêtre criant : « Vive l’abbé Fyten! A bas les Francs-Maçons et les calomniateurs! » Une voiture jonchée de fleurs attendait l'abbé qui y prit place à côté du doyen ; des voitures de maîtres, des véhicules de toutes sortes, des charrettes de paysans suivaient à la file. L'abbé Fyten avait eu la chance d'être traduit devant le jury ; s'il eût comparu devant des magistrats Francs-Maçons , il eût probablement fini ses jours dans uneprison. Combien de prêtres innocents ont péri ainsi!