LE JUIF DANS L’HISTOIRE DE FRANCE
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« Monseigneur »,
« J’envoie à Votre Éminence un petit mémoire de ce que j’ai pu déterrer touchant le Juif dont j’ai eu l’honneur de vous parler.
« Si votre Excellence juge la chose importante, oserais-je vous représenter qu’un Juif n’étant d’aucun pays que de celui où il gagne de l’argent, peut aussi bien trahir le roi pour l’empereur, que l’empereur pour le roi. »
MÉMOIRE TOUCHANT SALOMON LEVI.
« Salomon Levi, Juif natif de Metz , fut d’abord employé par M. de Chamillard; il passa chez les ennemis avec la facilité qu’ont les Juifs d’être admis et d’être chassés partout. Il eut l’adresse de se faire muni- tionnaire de l’armée impériale en Italie ; il donnait delà tous les avis nécessaires à M. le maréchal de Villeroi, ce qui ne l’empêcha pas d’être pris dans Crémone.
« Depuis, étant dans Vienne, il a eu des correspondances avec le maréchal de Villars. U eut ordre de M. de Torcy , en 1713, de suivre milord Marlborough, qui était passé en Allemagne pour empêcher la paix, et il rendit un compte exact de ses démarches.
« Il fut envoyé secrètement par M. Leblanc à Pirtz, il y a dix-huit mois, pour une affaire prétendue d’État, qui se trouva être une.billevesée.
« A l’égard de ses liaisons avec Willar, secrétaire du cabinet de l’empereur, Salomon Levi prétend.que Willar ne lui a jamais rien découvert que comme à un homme attaché aux intérêts de l’Empire, comme étant frère d’un autre Levi employé en Lorraine et très connu.
« Cependant il n’est pas vraisemblable que Willar, qui recevait de l’argent de Salomon Levi pour apprendre le secret de son maître aux Lorrains , n’en eût pas reçu très volontiers pour en apprendre autant aux Français .
« Salomon Levi, dit-on, a pensé être pendu plusieurs fois, ce qui est bien plus vraisemblable.
« Il a correspondu avec la compagnie comme secrétaire de Willar.
« Il compte faire des liaisons avec Oppenhemer et Vertenbourg, muni- tionnaires de l’empereur, parce qu’ils sont tous deux Juifs comme lui.
« Willar vient d’écrire une lettre à Salomon, qui exige une réponse prompte, attendu ces paroles de la lettre : « Donnez-moi un rendez-vous « tandis que nous sommes encore libres. »
« Salomon Levi est actuellement caché dans Paris pour une affaire particulière, avec un autre fripon nommé Rambeau de Saint-Maire. Cette affaire est au Châtelet et n’intéresse en rien la Cour. »
Les multiples trafics auxquels se livrait Voltaire ne vont pas sans quelques mésaventures. Mêlé aux affaires du Juif Médina, Voltaire perdit dans la banqueroute du fils de Jacob vingt mille livres qu’il regretta toute sa