LE JUIF DANS L’HISTOIRE DE FRANCE
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Pour les comédiens, la chose souffrit peu de difficultés, mais la discussion fut vive quand on aborda la question des Juifs.
Le débat, commencé le 21 septembre 1789, se continua les jours suivants. Un gentilhomme prévoyant, M. de Clermont-Tonnerre, ne manqua pas de prendre la défense des Juifs; un de ses descendants du reste a été, je crois, fortement échaudé dans l’afiaire de l’Union générale *.
M. de la Fare, évêque de Nancy, vint raconter une jolie anecdote quia été bien souvent rappelée à propos d’autres Juifs*. « Un jour, dit-il, que je m’étais transporté au milieu d’une émeute pour essayer de rétablir le calme, un des séditieux s’approcha de moi et me dit : « Ah! monsieur si nous venions à vous perdre, nous verrions un Juif devenir notre évêque, tant ils sont habiles à s’emparer de tout... »
L’abbé Maury fit entendre quelques paroles de raison et montra, par l’exemple de la Pologne, ce qu’allait devenir la France mise à la glèbe par le Juif :
Les Juifs, dit-il, ont traversé 17 siècles sans se mêler aux autres nations; ils n’ont jamais fait que le commerce de l’argent ; ils ont été les fléaux des provinces agricoles. Aucun d’eux n’a ennobli encore ses mains en dirigeant le soc et la charrue. En Pologne, ils possèdent une grande province. Eh bien 1 les sueurs des esclaves chrétiens arrosent les sillons où germe l’opulence des Juifs qui, pendant que leurs champs sont ainsi cultivés, pèsent des ducats et calculent ce qu’ils peuvent ôter des monnaies sans s’exposer aux peines portées par la loi.
Us possèdent en Alsace 12 millions d’hypothèques sur les terres; dans un an ils seront propriétaires de la moitié de cette province; dans dix ans ils l’auront entièrement conquise, et elle ne sera plus qu’une colonie juive.
Un représentant de l’Alsace, peu suspect d’idées rétrogrades, mais qui connaissait les Juifs puisqu’il les avait vus à l’œuvre, Rewbell, confirma l’exactitude de ces faits.
Camille Desmoulins, qui parlait des questions sans les connaître, ne manqua pas, comme tous les républicains d’aujourd’hui, de prendre parti
1. Cet ami des Juifs lui-même fut puni de ce mauvais discours qui était une mauvaise action. « 11 avait vu, dès le matin du 10 août 1792, dit M. le comte de Reiset, dans son ouvrage les Modes et Usages au temps de Marie-Antoinette, investir son hôtel dans lequel on prétendait qu’il y avait des armes. Arraché des bras de sa femme et conduit à sa section, il avait été reconnu innocent et renvoyé chez lui. Lorsqu’il y retournait, un cuisinier, qu’il avait chassé, ameuta le peuple contre lui. Après l’avoir harangué, il reçut sur la tête un coup de faux et s’enfuit chez madame de Brassac, rue de Vaugirard. On l’y poursuivit jusqu’au quatrième étage où il fut tué. »
2. Qui ne connaît le mot de Monseigneur Dupanloup, à propos de Jules Simon:«Il sera cardinal avant moi. >