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LA FRANCE JUIVE
être de convertir en décision doctrinale les réponses déjà rendues par l’assemblée.
« Sa Majesté, avait dit Molé, a voulu qu’il ne rest/tt aucune excuse à ceux qui ne deviendraient pas citoyens, elle vous a assuré le libre exercice de votre religion et la pleine jouissance de vos droits politiques, mais, en échange de l’auguste protection qu’elle vous accorde, elle exige une garantie religieuse des principes énoncés dans vos réponses. »
Les deux tiers des membres du Sanhédrin devaient être des rabbins parmi lesquels prendraient place d'abord ceux qui avaient fait partie de la précédente assemblée, les autres membres devaient être désignés par cette assemblée au scrutin secret.
Le grand Sanhédrin se réunit le A février 1807 et ses séances durèrent jusqu’au 4 mars de la même année'.
Elle était faite pour frapper l’imagination, la réunion, après tant de siècles, des descendants de cette race si longtemps proscrite. Pour la première fois depuis la destruction du Temple, un Sanhédrin rassemblait les membres de cette famille errante dans une ancienne chapelle qui, avant de devenir une annexe de l'Hôtel de Ville, avait été longtemps consacrée à Saint Jean, le disciple bien-aimé du Christ.
Les représentants d’Israël semblent avoir été émus par la solennité de ce spectacle. Un de leurs premiers actes eut un caractère de grandeur qui n’est point habituel à ce qui sort d’eux.
Ils se rappelèrent les longues persécutions, les années innombrables qui s'étaient succédé toujours emplies d’angoisses aussi vives, toujours menacées de périls aussi redoutables. Ils se souvinrent que, pendant plus de douze cents ans, un homme seul avait constamment parlé pour eux, avait déclaré sans cesse qu’il fallait respecter la liberté de leur conscience, était intervenu auprès des rois pour protéger les persécutés, avait donné
l’exemple de la tolérance en accordant aux Juifs, dans ses Etats, un traitement meilleur que partout ailleurs. Cet homme, toujours le même dans sa doctrine, toujours semblable dans sa bonté, cet homme qui ne meurt jamais, était le Vicaire de Jésus-Christ 1 2 .
1. Chateaubriand semble croire à quelque arrière-pensée de Napoléon d’occuper un jour Jérusalem. Il écrit dans les Mémoires d’outre-tombe : « Remueur de tout, Napoléon imagina vers cette époque le grand Sanhédrin. Cette assemblée ne lui adjugea pas Jérusalem, mais, de conséquence en conséquence, elle a fait tomber les finances du monde aux échoppes des Juifs, et produit par là dans l’économie politique une fatale subversion. »
2. On trouve, à chaque page de l’histoire, trace de cette protection accordée aux Juifs par la Papauté. Au vit 0 siècle, saint Grégoire les défendit et les protégea dans tout le monde chrétien Alexandre II félicita chaleureusement les évêques d’Espagne, qui avaient