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LA FRANCE JUIVE
pont deKehl; il rêvait de faire de ce pont une espèce de pont d’Avignon où tous les peuples danseraient en rond.
Ils sont tous ainsi : Généraux, écrivains, tous se confessent aux Juifs.
Vous avez vu le colonel Dupin; regardez le colonel Stoffel. Lui aussi, il reçoit la visite d’un Juif, qui vient en sondeur, comme on dit dans l’argot des voleurs. Lisez ce que le colonel mande à Piétri et vous verrez bien à l'œuvre le Juif entremetteur, tâteur de terrain, moitié espion et moitié négociateur.
Le lieutenant-colonel Stoffel écrivait à M. Piétri, à la date du 20 novembre 1868, pendant que M. de .Moitke exécutait son fameux voyage d’étude sur nos frontières :
Je vous disais, dans ma dernière lettre, que j’avais d’assez curieux détails à vou3 donner; voici la chose : M. B..., dont j’ai parlé plus haut, est un banquier important de Berlin, correspondant de Rothschild et homme d’affaires de Bismarck. Parti de bas, il est parvenu, à force de constance et Je sens pratique, à se faire une position considérable. C’est le seul Juif que Bismarck reçoive familièrement, le seul chez qui il consente à dîner. 11 l’emploie comme chasseur aux renseignements, lui donne certaines missions de confiance, etc., etc. Chose à noter dans l’histoire des gouvernements prussiens qui se sont succédé depuis cent ans, ils ont presque tous employé un Juif (déjà du temps de Sieyès), comme instrument plus ou moins occulte. Celui dont je vous parle, sans être précisément un intrigant, aspire à jouer un rôle et à prendre la place de ses devanciers, parmi lesquels le Juif Ephraïm brille au premier rang. Ajoutez que c’est un homme doux, de formes bienveillantes, avec lequel je vis en relations assez suivies et cordiales. Or donc, M. B..., après avoir passé huit jours à Varzin, chez Bismarck, est venu me trouver tout dernièrement, et, si je vous conte les détails de notre entrevue, c’est que tout me porte à croire qu’il était chargé de me sonder ou de connaître mon avis. Il eut soin, comme préambule, de me demander le secret le plus absolu sur notre conversation, et me raconta longuement ses derniers entretiens avec Bismarck et les dispositions où il avait trouvé celui-ci.
Le ministre, me dit M. B..., désire la paix plus ardemment que jamais; il fera tout son possible pour la conserver; il est d’autant plus sincère en s’exprimant ainsi qu’il explique lui-même pourquoi le Nord ne peut ni ne doit désirer aujourd’hui l’annexion des États du Sud; que l’unité de l’Allemagne se fera tout naturellement d'elle-même, tôt ou tard, et que sa mission, à lui, Bismarck, n’est pas d’en hâter le moment, mais bien de consolider l’œuvre de 1866, etc., etc. De tous côtés, on se demande s’il n’existe aucun moyen de rétablir la confiance entre la France et la Prusse, aucun moyen de rassurer les esprits en Europe et faire cesser cette affligeante stagnation des affaires. Une entrevue de l’Empereur avec le roi Guillaume serait regardée par beaucoup de gens comme le moyen le plus efficace d’atteindre ces résultats. Il en a été question à Varzin, et les personnes de l’en-