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La France juive : essai d'histoire contemporaine / Édouard Drumont
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LA FRANCE JUIVE

comme on la nomme, prélève sur chaque joueur un impôt véritablement léonin. Un écrivain, qui sest particulièrement occupé de cette question, estime que les sommes ainsi perçues par les directeurs de cercles se sont élevées à soixante millions en cinq ans.

Il y a, à Paris , dit-il, à lheure même jécris ces lignes, plus de cent maisons du genre de celle que je cite, lon joue le haccara. Sur ces cent tripots, vingt-cinq au moins fonctionnent dans des conditions excep­tionnellement productives. Si bien que, calcul fait, on estime que, depuis les cinq dernières années, ces vingt-cinq maisons seulement ont englouti dans la cagnotte la somme, nous nosons dire respectable, de soixante à soixante-cinq millions! cest-à-dire que le malheureux joueur, sans compter ses pertes naturelles, sans compter les vols dont il a pu être victime, a, avant de courir les chances de bénéficier dun centime, payer en cinq années un tribut dau moins soixante millions).

Nest-ce pas réellement effrayant? Et pourtant ce nest pas tout encore, car le joueur a dautres charges, auxquelles il ne peut se soustraire et qui naturellement concourent toutes à sa ruine.

Nous voulons parler du cadeau fait au croupier par celui qui tient la banque, et de lintérêt servi à la caisse des prêts. Nous nous contenterons dindiquer sommairement en quoi consistent ces deux nouveaux impôts.

Lorsque le banquier lève une banque, après avoir gagné, lhabitude est de laisser une petite somme au garçon qui « croupait » pendant la taille. Ce pourboire nest pas limité; toujours est-il quil est ainsi abandonné, après chaque banque en bénéfice, une somme qui varie entre quinze et deux cents francs, suivant limportance du gain ou la générosité du banquier.

Quant à lintérêt de largent prêté, il est toujours des plus considérables, puisquon a pu constater quun garçon de jeu, avec un seul billet de mille francs, était arrivé à doubler son capital dans une seule soirée.

outre : le Cercle central, le Ilunting-Club, le Cercle des Arts-Réunis, le Cercle de lEscrime, le Cercle de la Presse, le Cercle artistique de la Seine, le Cercle Washington et le Cercle Français.

La cagnotte quotidienne de ces neuf établissements est de 69,800 francs.

Le Cercle de lEscrime, auquel Camescasse n'a pas touché, est fortement appuyé par des hommes dÉtat républicains qui trouvent le déjeuner et le dîner : il a eu pour président un nommé Etienne Junca, Juif, je crois, dorigine, et qui a été décoré comme homme de lettres, ce qui est bien flatteur pour les écrivains et même pour les militaires qui ont gagné leur croix, non dans les claque-dents, mais sur les champs de bataille.

M. Laisant a raconté, dans son journal la République radicale, quau mois de décembre 1884, un Juif, nommé Goldsmith, ayant braqué son revolver sur deux autres joueurs, ceux- ci avaient fait immédiatement le même mouvement. Ce sont tout à fait les mœurs des Haciendas du Mexique et des maisons de jeu de San-Franscisco.

Il se produit, dailleurs, presque chaque jour, dans ce Cercle protégé par la police, des scènes inénarrables. Ce fut à la suite dune séance du Conseil dadministration, qui avait été véritablement épique, que le garçon dit à un des assistants qui venait se laver les mains au lavabo ce mot étonnant :

Que se passe-t-il donc, monsieur? Jamais on na volé tant de savon quaujourdhui.

1. Figaro, février 1884.