PARIS JUIF ET LA SOCIETE FRANÇAISE
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merce parisien, qu’on est bien forcé de tolérer par la force des choses, quelque répréhensibles qu’elles soient, et qui consistent à mouiller d’un cinquième.
Remarquons, en outre, qu’à part les produits nuisibles le Laboratoire n'empêche de rien vendre; il dit seulement aux marchands de vin : « Ne trompez pas, annoncez du vin additionné d’eau, du vin fabriqué avec de la fécule de pomme de terre, du cognac orné d’un bouquet d’éther. En boira qui voudra. »
C’est cet appel à la plus élémentaire loyauté qui révolte les républicains organisateurs de ces meetings. Ils ont obtenu gain de cause, en tous cas, et depuis le mois de juillet 1883, il est défendu au Laboratoire d’employer officiellement les mentions mauvais et nuisibles. En 1884, Lyon -Allemand , chargé du rapport au Conseil municipal, fit même voter le rattachement à la Préfecture de la Seine, mais cette délibération fut cassée 1 .
N’est-ce pas bien Franc-Maçon tout cela? Les hommes qui refusent au pauvre agonisant, dans un hôpital, le cordial de quelque bonne parole du prêtre qui le réconforte et l’encourage, ne sont-ils pas logiques avec eux- mêmes en refusant aux travailleurs le cordial d’un verre de vrai vin qui le remette un peu de ses fatigues? « Malheur au pauvre! » dit l’opulent Lockroy. Le riche seul aura droit à avoir un peu d’idéal dans l’âme, un peu de chaleur à l’estomac, un peu d'esprit par là-haut, un peu de gaieté saine ici-bas. >> Si l’on pouvait mettre l’air qu’on respire en exploitation, ces aigrefins formeraient un syndicat pour empêcher les indigents d’en profiter.
A défaut de l'air, nos braves républicains eurent l’idée d’exploiter les débris jetés à la borne. Qui eût imaginé qu’un gouvernement prétendu démocratique pùt avoir seulement la pensée d’interdire aux déshérités de recueillir, pour soutenir leur misérable existence, les rebuts de la ville magnifique, de ramasser les miettes de la fête? Cette implacable dureté a
1. Le Conseil municipal est tellement de cœur avec les falsificateurs que, dans la séance du 2 mars 1885, il émet un vœu pour l’abrogation du paragraphe 14 de 1 article 15 du décret du 2 février 1832, qui prive de leurs droits électoraux les empoisonneurs publics. Dans une réunion organisée le 20 mars 1885, au Cirque-d’Hiver, sous la présidence de Tony Révitlon, les députés présents s'engagèrent à saisir la Chambre de cette question. Dans la séance du Conseil général du 6 juillet 1885, Mesureur, le débaptiseur de rues, prit main la cause de ceux qui baptisent le vin, et fit voter une proposition tendant a les relever de leurs condamnations.
Cela ne suffisait pas encore à ce maître de l’époque, qu’on a appelé le n» Mastroquet. 11 ï eut, aux élections de 1885, un candidat des marchands de vin mouilleurs, Auguste hude, et grâce à la Franc-Maçonnerie , il fut nommé 1