LA FRANCE JUIVE
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La presse, l’opinion publique et la magistrature seules soutiennent mon droit. Et vous, Monsieur le Ministre, ministre de la République, qui doit être le règne de la loi, permettrez-vous que ce crime reste impuni?
Les auteurs de la séquestration sont morts depuis quatre ans, et leurs complices continuent cette œuvre inique.
Un pasteur protestant et quelques sectaires de Montauban paient la pension d’Anna Féral dans une maison d’éducation. Ils sont donc en révolte contre la loi.
Mais, si un prêtre catholique avait commis ce crime, il y a longtemps que justice serait faite.
Et, sous le vain prétexte d’une question religieuse, on viole les arrêts, la loi et l’humanité !
Et votre personne, devant cet attentat, serait insensible? Non.
La question religieuse a été mise en avant par les criminels ; c’est une infamie, car je n’ai jamais pensé qu’à ma petite-fille, seule au monde, cloîtrée je ne sais où, jamais à ses croyances.
Est-ce que le fanatisme protestant doit faire remonter la nation aux temps de l’Inquisition?
Que devient, en ma personne, l’autorité paternelle violée, la loi méconnue, l’iniquité triomphant de la justice? Que signifie cette question religieuse, en présence d’un enfant séquestré depuis l’âge de quatre à cinq ans?
Que ma fille soit protestante, juive ou mahométane, je n’ai pas à m’en occuper, ni personne encore moins.
C'est mon sang, ma propriété, le seul être qui me reste au monde, et personne n’a le droit de me l’enlever, pas même le chef de l’État.
Je viens vous supplier, monsieur le Ministre, de donner des ordres pour que ce scandale cesse, au nom même de la dignité du gouvernement.
Je patiente depuis quatre ans que j’ai perdu ma fille, que ces sectaires ont tuée.
Je m’efforce de rester calme; mais si, au mépris de mes droits violés, de mon asservissement, mon cœur meurtri finit par éclater et que quelque malheur ait lieu, la responsabilité ne retombera pas sur moi, pauvre vieillard abandonné, qui h’ai que cette pauvre petite-fille qu’on séquestre et que je veux voir avant de mourir! et tout cela parce qu’un prêtre protestant le veut!... et l’impose à la justice.
Je prends Dieu à témoin que l’on me pousse aux dernières extrémités.
Vous seul, Monsieur le Ministre, pouvez mettre enfin un terme à ces atrocités, en ordonnant que les coupables soient poursuivis et en ordonnant aussi que ma petite-fille soit transférée dans une maison d’éducation de Montauban, où du moins je pourrai la voir, puisque mon âge et ma position ne me permettent pas de la garder avec moi. *
C’est au nom de la loi violée, de la justice outragée, de la conscience publique et de la nature méconnues que je vous implore pour la dernière fois.
Recevez, Monsieur le Ministre, l’hommage de mon profond respect
Barboteaü.
Grand-père et tuteur d’Anna Féral.